Au sortir d’un mois de confinement, la progression de la pandémie semble se ralentir, mais l’hypothèse d’une fin partielle de celui-ci au 11 mai fait débat. Le baromètre économique continue d’afficher une dégradation, notamment pour les PME et TPE. Les syndicats de salariés réclament l’abandon des réformes voulues par le Gouvernement.
Le point sur les problématiques sanitaires
Le Syndicat des médecins libéraux met les choses au point sur le déconfinement. Il soutient que celui-ci «ne doit être engagé que si la France est en capacité de contrôler la propagation de l’épidémie, ce qui suppose que notre pays soit suffisamment armé en termes de tests, de traçabilité des cas contacts, de matériel de protection spécifique pour les soignants et de masques pour le grand public, en attendant les traitements et le vaccin». Le SML se prononce ainsi clairement contre «les critères d’âge que le Gouvernement pourrait retenir» et rappelle que contraindre «les personnes de plus de 70 ans à demeurer isolées (…) aurait de nombreuses conséquences délétères».
Par la voix de sa présidente Nathalie Delphin, le Syndicat des femmes chirurgiens-dentistes (SFCD) interroge l’Ordre des chirurgiens-dentistes sur «la mise en pratique de l’union sacrée», telle qu’esquissée par une réunion organisée le 15 avril, entre l’Ordre, plusieurs syndicats, l’Association dentaire française. Le SFCD demande à pouvoir «participer aux futures réunions».
Le point sur les problématiques économiques
La Confédération paysanne lance un appel aux pouvoirs publics pour «la réouverture des marchés alimentaires sur le seul critère de leur capacité à assurer les règles sanitaires», moyennant «une clarification urgente du décret n°2020-293 du 23 mars», ainsi que «l'application des mêmes critères (sanitaires-NDLR) dans les supermarchés et hypermarchés au bénéfice des salarié.e.s de la grande distribution et des consommateurs et consommatrices». Le syndicat professionnel agricole réclame aussi «la transparence des prix d'achat et des prix de vente de la grande distribution, donc des marges de cette dernière», de telle sorte que puisse être assurés «des prix rémunérateurs aux producteurs.trices» et qu’il n’y ait pas d’effet spéculatif reporté sur le consommateur.
Sur un autre terrain, La Conf’ et la Fédération nationale de l’agriculture biologique demandent à l’État d’assurer «un droit au “remplacement pour garde d’enfants”, sans surcoût pour les paysans», ainsi que de leur permettre d’adresser «leurs enfants en crèche ou dans les écoles». Le syndicat professionnel agricole rappelle que les agriculteurs sont confrontés à diverses urgences: «intensification de l’activité au printemps», «imaginer (…) des modes de commercialisation alternatifs». La prolongation du confinement jusqu’au 11 mai en est une supplémentaire.
La Fédération DLR, représentant les entreprises des secteurs de la distribution, de la location et de la maintenance des matériels de BTP et de manutention, souhaite que ses «partenaires (comprennent-NDLR) qu’il est de leur intérêt que nos entreprises soient encore là au sortir de cette crise». L’organisation professionnelle s’adresse ici, en particulier, aux entreprises du BTP, pour faire valoir les droits de ses adhérents dans un contexte où «Les demandes de suspension, voire de résiliation, des contrats de location» se multiplient, le plus souvent au motif de «cas de force majeure». Pour DLR, les textes (ordonnance du 25 mars 2020, Code civil) ne permettent pas en réalité de se prévaloir de ce motif, ce pourquoi elle appelle à «trouver des accords équilibrés, plutôt que tenter de passer en force».
La Confédération des petites et moyennes entreprises «renouvelle donc instamment son appel à ce que les pertes d’exploitation des TPE-PME assurées soient enfin couvertes par les assurances», une demande qui s’appuie sur les résultats d’une enquête CPME menée auprès de plus de 3000 chefs d’entreprise début avril. L’organisation professionnelle d’employeurs y indique que « 76% (des sondés) à déplorer le manque de soutien de leur assureur». En revanche, « la mise en oeuvre des aides de l’État est bien accueillie. 81% des entrepreneurs s’estiment bien informés sur des dispositifs qu’ils sollicitent massivement». Ce qui n’empêche pas que «plus d’un dirigeant sur deux (55%) craint la faillite de son entreprise».
La veille sociale des syndicats
La Confédération générale du travail préconise «l’annulation d’urgence de toutes les mesures régressives depuis le 1er novembre 2019 et la mise en place d’une véritable sécurité sociale intégrale permettant d’assurer un revenu de remplacement à toutes les personnes qui sont privées de l’exercice de leurs droits au travail». La CGT, pour juger que l’aménagement de la réforme de l’assurance chômage agréé récemment par le Gouvernement est un «goutte-à-goutte» bienvenu pour les chômeurs et précaires, n’en rappelle pas moins que «il n’a pas renoncé à mettre en oeuvre le durcissement d’accès aux droits, (relèvement du seuil d’accès et fin du rechargement depuis le 1er novembre 2019)» ni «à diviser par 2, 3 ou 4 les allocations chômage au 1er septembre puisque le décret (du 14 avril, NDLR) articule le calcul avec cette baisse programmée».
Le syndicat de salariés demande, par ailleurs que «que les salarié.e.s en activité partielle (du secteur de la petite enfance-NDLR) soient payés à 100% de leur salaire». Une adresse aux pouvoirs publics, mais aussi aux entreprises de crèche du secteur marchand, bénéficiaires «de mesures exceptionnelles de compensation financière» de la part de la CNAM, à l’instar du secteur public certes, mais lequel n’a pas «accès à ce dispositif et (doit-NDLR) donc continuer à rémunérer les salarié.e.s à 100%». Pour la CGT, la contestation du dispositif par certains gestionnaires de crèche privés (par voie de pétition notamment-NDLR) est tout à fait injustifiée.
La Confédération générale de l’encadrement (CFE-CGC) estime que des précautions et, surtout, une capacité à créer de la «confiance» doivent être mis en œuvre pour le déploiement envisagé d’une «application de traçage numérique». Il s’agit donc d’intégrer un certain nombre de «prérequis indispensables», à savoir: «réelle efficacité sanitaire, et les conditions nécessaires pour y arriver», «finalité de l’application» et, en particulier le traitement «des données de santé, définies comme sensibles, requérant toute notre vigilance et toutes les précautions en termes d’études d’impact». Prenant appui sur un avis récent de la CNI, la CFE-CGC rappelle que «l’objectif de StopCovid ne peut s’entendre qu’en complémentarité d’autres dispositifs, la solution n’étant pas la technologie elle-même, mais bien l’usage qu’il est décidé d’en faire». Quant à la confiance, elle réside «dans la parole politique», au-delà du «simple rôle d’instrument de communication».
Les organisations syndicales CGT, FO, FSU, Solidaires, Fédération autonome de la fonction publique font part de leur désaccord avec les mesures prises par le Gouvernement en matière de «primes, congés, RTT». Sur le premier point, elles constatent que d’une part, il va générer des inégalités, mais qu’en outre «la priorité (doit rester-NDLR) à la santé des personnels». Plus généralement, les signataires affirment que «l’urgence est à l’ouverture d’une véritable négociation salariale (…) qui doit porter sur le dégel sans délai du point d’indice et des mesures générales actées dans le budget 2021». Concernant les dispositions sur les congés et les RTT, ils les «condamnent avec la plus grande fermeté».
Un collectif syndical (CGT-SNTEFP, Snutef-FSU, Sud Travail affaires sociales, Confédération nationale du travail Travail-Emploi formation professionnelle) saisit l’Organisation internationale du travail au motif que «le ministère du Travail organise la paralysie et le court-circuitage de l'inspection du travail et l'empêche d'exercer ses missions en violation de ses engagements internationaux». Sont invoqués notamment «des instructions contraires au droit en matière de droit de retrait et de protection de la santé au travail», le manque «d’approvisionnement rapide en masques de protection des agent-es de contrôle», des «pressions directes sur les inspecteur-trices du travail».
L’Union syndicale Solidaires prend également parti contre «la suspension immédiate d’un inspecteur du travail pour avoir osé engager une procédure de référé à l’encontre d’une entreprise». Pour le syndicat, «la Ministre et son bras armé, la DGT (…) font tout pour museler son action (de l’inspection du travail-NDLR): limitation des interventions aux seules actions déterminées par le ministère, interdiction d’envoyer des courriers types d’information aux entreprises, etc». Le syndicat précise également que «l'indépendance de l'inspection du travail par rapport au pouvoir politique et au patronat (est un-NDLR) principe garanti par la convention internationale de l’OIT».
Le Syndicat national de l'enseignement technique agricole public, affilié à la Fédération syndicale unitaire, interpelle les pouvoirs publics pour obtenir «des réponses urgentes et des engagements écrits du Ministère avant que soit envisagé le retour des personnels et du public» dans les établissements professionnels agricoles (EPLEFPA). L’organisation professionnelle met en exergue les difficultés du point de vue des conditions matérielles (hébergement, restauration, espaces d’enseignement, transports, mais aussi manque de «personnels de santé» ou de «service social») que susciterait l’ouverture annoncée par le Président de la République au 11 mai 2020. Elle ne manque pas de rappeler que la situation est aggravée par «des réformes qui se traduisent notamment par une diminution du nombre de postes de fonctionnaires dans nos établissements et les mesures profondément anti-pédagogiques touchant aux seuils de dédoublement». Et d’évoquer aussi la question des «moyens de protection (…) que les pouvoirs publics seront en mesure de mettre à disposition des usagers et des personnels».