La mesure d’audience 2021 des organisations syndicales de salariés est connue. Elle permettra d’établir leur représentativité nationale interprofessionnelle. Au-delà de leurs résultats propres, les confédérations constatent une baisse de la participation imputable notamment à la réforme des instances du personnel.
C’est le 26 mai 2021 que le Haut Conseil du dialogue social a rendu publics les résultats de la mesure de «L’audience (qui-NDLR) constitue l’un des critères essentiels permettant d’établir la représentativité d’une organisation syndicale et ainsi sa capacité à signer des accords collectifs. Au niveau national et interprofessionnel, comme au niveau des branches professionnelles, une organisation syndicale doit recueillir au moins 8% des suffrages exprimés». Ainsi que le précise encore le ministère: «La mesure de l’audience des syndicats est le fruit d’un processus continu de concertation avec les partenaires sociaux membres du HCDS qui garantit sa transparence».
Le 3e cycle de mesure d’audience dans les entreprises et les chambres d’agriculture
Correspondant au 3e cycle de la mesure de représentativité, le résultat communiqué le 26 mai intègre ceux rendus publics le 26 avril pour les élections professionnelles dans les seules TPE. Couvrant le cycle 2017-2021, il agrège aussi les résultats des élections dans les entreprises de plus grande taille (enregistrés sur la période janvier 2017-décembre 2020) ainsi que ceux des élections de 2019 au sein des chambres d’agriculture. Le ministère précise encore que «le HCDS rendra au mois de juillet un avis sur la liste des organisations syndicales représentatives au niveau national et interprofessionnel, puis, au second semestre, au niveau des différentes branches».
D’après les chiffres officiels, près de 15 millions de salariés étaient concernés par l’élection, mais seuls 38% ont effectivement participé au scrutin. Les votants ont marqué leur préférence, par ordre d’importance, à la CFDT, la CGT, FO, la CFE-CGC, la CFTC, l’Unsa, Solidaires et divers Autres. Compte tenu du seuil de 8%, l’Unsa et Solidaires ne devraient pas accéder à cette représentativité, malgré leur progression. La CFE-CGC conserve quant à elle, un niveau d’audience majeur (et plus élevé) auprès des cadres salariés.
Une participation plombée par la réforme des instances représentatives du personnel
Classée première avec 26,77% des suffrages, la Confédération française et démocratique du travail estime que la baisse de participation (…) interroge», mais fait le lien «avec les ordonnances de 2017 qui ont supprimé les représentants de proximité». Elle évoque aussi «une période bousculée par les crises économiques et sanitaires, chahutée par des tentations extrémistes»… Une situation qui exige plus que jamais «un syndicalisme fort et efficace», «utile, qui répond à leurs préoccupations (des salariés-NDLR). Le syndicat, rend par ailleurs public le nombre de ses «610 144 d’adhérentes et adhérents à quasi-parité, avec 51 % de femmes et 49 % d’hommes» attestée par les commissaires aux comptes, tout comme la validité de ses comptes financiers.
Créditée de 22,96% des votes, la Confédération générale du travail évoque aussi une «baisse de participation (qui-NDLR) doit interpeller tous les acteurs de la démocratie sociale». Et d’incriminer «la nouvelle organisation du dialogue social dans l’entreprise avec l’apparition du CSE», dont la mise en œuvre a été freinée par «la mauvaise volonté du patronat, couplée au dogmatisme gouvernemental». C’est pourquoi elle revendique l’établissement d’«une période de vote commune à tout le salariat et favorisant le vote physique». Si elle «est, par ailleurs, première organisation dans la Fonction publique», la centrale «mesure le déficit de présence qu’elle doit combler auprès de tous les salariés quelles que soient leurs catégories socio-professionnelles et leurs diversités pour redevenir première organisation syndicale dans le secteur privé.»
Pour Force ouvrière, qui réalise 15,24% d’audience, le déficit de votants renvoie aussi à «la suppression des comités d’entreprises et des délégués du personnel, fondus dans une instance unique - le CSE - (qui-NDLR) réduit la capacité de représentation collective du personnel (…) et a contribué à alourdir les responsabilités devant être endossées par les délégués élus, ajoutant aux craintes de représailles quant à l’engagement syndical». En outre «la mise en place des CSE dans un délai contraint, (a-NDLR) rendu d’autant plus difficile la mobilisation des structures syndicales». Et le «confinement» a aggravé la situation. FO «se satisfait d’avoir stabilisé le niveau de sa représentativité globale», peut s’appuyer sur «sa deuxième place dans la fonction publique hospitalière», mais «va analyser en détail les résultats par secteurs professionnels et s’attelle d’ores et déjà à (…) analyser ses difficultés pour y apporter des réponses positives».
La Confédération générale de l’encadrement, soutenue par 11,9% des électeurs, se félicite d’obtenir «20,71% dans son champ statutaire de l’encadrement, et 11,92 % tous collèges confondus», non sans évoquer «un (…) recul général de la participation» et «un contexte de crise et (…) un monde du travail en pleine transformation». Le syndicat des cadres tient à souligner la progression qu’il réalise par rapport au précédent cycle, soit «plus de 38 000 voix» qui lui assure «une montée en puissance au service de tous les salariés de l’encadrement (cadres, agents de maîtrise, techniciens, forces de vente)».
Pour la Confédération française des travailleurs chrétiens, qui rallie 9,50% des votants, il faut aussi prendre en compte un «contexte actuel de crise sanitaire, d’incertitudes quant à ses conséquences économiques et sociales». L’organisation se réjouit d’un score qui «rattrape les résultats décevants obtenus récemment dans les TPE », lui permet «avec une voix plus déterminante que jamais (poids relatif* de 11%), (de continuer-NDLR) à peser, durant les quatre prochaines années, dans toutes les négociations interprofessionnelles».
L’Union nationale des syndicats autonomes, créditée de 5,99% des suffrages, met surtout l’accent sur «un score cumulé de 7,68% sur la représentativité du public et du privé confondus» grâce auquel elle «devient la 5e organisation syndicale», en «progression constante» sur les 3 cycles électoraux du publics et du privé. L’Unsa «représentative dans 78 branches professionnelles» se «donnera les moyens de se présenter partout».
L’Union syndicale Solidaires, rassemblant 3,68% des bulletins, juge que «la mise en place des CSE, véritable attaque contre le syndicalisme de proximité, et le développement du vote électronique, (…) expliquent sans doute la baisse de participation». Si elle se félicite de progresser «en pourcentage et en voix (…) par rapport au calcul de 2017», l’Union n’en estime pas moins qu’«une véritable mesure de représentativité devrait prendre en compte l’ensemble des résultats électoraux, y compris ceux de la Fonction publique». Un secteur dans lequel sa représentativité est forte, tandis que pour le secteur privé elle «est reconnue (comme telle-DNLR) dans au moins 30 conventions collectives nationales et locales». Pour Solidaires, face aux «menaces de nouvelles mesures antisociales, le rôle des organisations syndicales est de construire les mobilisations (…) Si clivage il doit y avoir, il n’est pas entre syndicats “représentatifs” ou “considérés comme non représentatifs”, mais bien entre ceux qui acceptent et accompagnent les politiques libérales et ceux qui les refusent et les combattent».
Affilié à l’union, le Syndicat national des journalistes se félicite quant à lui d’une « très forte progression (…) puisque notre audience passe de 37,83% à 40,42%». Un résultat d’autant plus important que «une Commission paritaire permanente de négociation et d'interprétation (CPPNI) vient d’être créée chez les journalistes», branche au sein de laquelle il devrait, à l’automne prochain, «peser 49,12%».