L'accord sur le plan de relance européen post Covid, s'il est généralement salué par les organisations professionnelles d'employeurs et de salariés, n'en génère pas moins des incertitudes ou inquiétudes.
Si la Confédération des Petites moyennes entreprises (CPME) salue l'accord par lequel «Pour la première fois de son histoire, l’Europe emprunte pour investir et relancer la machine économique, notamment sous l’impulsion de la France», elle n'en manifeste pas moins son inquiétude au regard de «coupes financières» sur des programmes intéressant les PME («Horizon Europe», «InvestEU», «fonds pour la transition juste»)et de la disparition du «nouvel instrument de soutien à la solvabilité (ISS) des entreprises». L'organisation professionnelle d'employeurs alerte les parlementaires européens afin qu'ils soutiennent «toutes les formes d’investissements en fonds propres et quasi fonds propres» servant la «solvabilité» des entreprises et s'assurent que «les ressources affectées aux différents programmes soient distribuées de manière simple, en toute transparence».
Un compromis historique… mais les syndicats agricoles sont inquiets
«Le budget de la PAC pour les 7 années à venir est globalement maintenu, ce qui est plutôt une bonne nouvelle tant les enjeux sont importants pour réorienter nos systèmes agricoles et alimentaires» note la Confédération paysanne. Pour autant, le syndicat professionnel agricole demande au ministre de l'Agriculture «de notifier avant le 1er août un relèvement de la prime aux premiers hectares (…) ainsi qu'un transfert supplémentaire de 7,5% du premier vers le second pilier pour sécuriser les paiements pour les années de transition 2021 et 2022». La Conf s'inquiète de «la baisse de moitié du budget du plan de relance alloué au 2e pilier» et, plus encore de la non-obligation de «plafonnement par actif» et du fait que «les paiements découplés (DPB) ne sont pas remis en cause alors qu'ils constituent un véritable accélérateur de l'agrandissement des fermes, au détriment de l'emploi et de l'environnement».
Pour le Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef), l'enveloppe reçue par la France au titre de la PAC sera en «baisse de 1,6% par rapport aux sept années précédentes» et il attend «les prochaines modalités concernant le bonus par rapport à la clef de répartition normale des fonds de la PAC d’un montant de 1600 millions d’euros». L'organisation regrette, en outre, «la baisse du premier pilier de 1,4 milliards d’euros». Et de réaffirmer sa demande en matière d'aides directes «que le critère surface soit remplacé par celui de l’actif et 1 salarié par exploitation à condition de plafonner les aides à 50000 €/actif» ainsi que pour «un renforcement des aides couplées en faveur de l’élevage».
La Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) et Jeunes Agriculteurs se réjouissent d'un «compromis historique concourant à la solidarité entre États membres», ainsi que «des avancées réelles sur le budget adopté» pour la politique agricole commune, dont «les moyens (…) sont maintenus à leur hauteur actuelle en euros courants, soit 386 milliards d’euros, dont 62 milliards d’euros pour la France». Mais ils rappellent que «l’impact de l’inflation n’est pas pris en compte» et, surtout, demandent que «les stratégies “Farm to fork” et “Biodiversité 2030” visant à accélérer les transitions notamment écologiques» soient effectivement adossées à des moyens.
La Coordination rurale estime qu'en fait «le Gouvernement affirme que le budget 2020-2027 est à l’identique du précédent (…) Or, (l'-NDLR) inflation prévisible, de l’ordre de 2% l'an, va amputer cette programmation pluriannuelle de 40 milliards d’euros, soit près d’une année budgétaire». Au-delà du budget de la politique agricole, insiste la CR, il est plus fondamental que l'Union européenne mette en place «une politique qui assure durablement un revenu aux agriculteurs par des prix de vente de leurs produits supérieurs à leur coût de production» et qu'elle acte, en urgence, de «réguler les productions agricoles européennes ainsi que de stopper les négociations en cours des accords internationaux incluant des produits agricoles».
Du côté de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (Agriculture&Territoires), on salue «l’acharnement du Gouvernement», et «la bonne nouvelle pour l’agriculture française (…) dans le maintien du budget de la PAC (336,44 milliards)». Pour l'APCA, «les aides PAC devront financer les transitions technologiques et écologiques», et il faudra «examiner dans les détails le contenu de la PAC, en lien avec les deux stratégies “Farm to Fork” et “Biodiversité”». La chambre consulaire se dit attachée à «une agriculture productrice d’emplois», tout en restant attentive «aux avancées réglementaires au niveau européen sur l’étiquetage, l’origine des produits et la possibilité d’introduire des critères de proximité dans la commande publique».
Des avancées… mais les syndicats de salariés ne veulent pas une contrepartie par l'austérité
Rappelant que «plus de 60 millions d’emplois étaient en jeu» et «qu'une réponse européenne était nécessaire pour restaurer la confiance des travailleurs en l’Europe, érodée durant la dernière crise», la CFDT (Confédération française et démocratique du travail) «se félicite de cet accord et des avancées qu’il comporte», sur le plan de l'économie, des objectifs climatiques, mais aussi de «l'État de droit».
Le syndicat de salariés regrette néanmoins que «la part en subvention soit revue à la baisse (…) ce qui risque d’alourdir la dette des pays les plus touchés par la pandémie» et considère, plus largement que «les concessions faites (…) démontrent que beaucoup de chantiers restent à mener» au sein de l'Union européenne, au regard desquels elle sera «résolument engagée (…) avec ses homologues européens et avec la Confédération européenne des syndicats».
Pour Force ouvrière, qui revendique également son alignement sur la confédération européenne, il faut veiller «avec la plus grande attention, à la manière dont cet accord sera mis en œuvre. Les plans nationaux de relance ne doivent pas devenir de nouveaux plans d’austérité mais devront au contraire protéger et renforcer les services publics et la protection sociale». L'organisation syndicale note en effet que le «mécanisme institutionnel», par les obligations faites aux États dans le cadre du «semestre européen», risque de conduire «aux mêmes recettes de ces dernières années» et que «Des coupes importantes sont opérées dans le budget européen, en particulier sur Erasmus, la recherche et l’innovation, la santé, la ruralité ou encore le fonds de transition juste, alors que les rabais consentis aux États sur leurs contributions – notamment aux États dits “frugaux” qui ont fortement pesé sur l’accord final – sont non seulement maintenus mais augmentés».