L’Institut national de l’origine et de la qualité joue depuis 1935, un rôle important dans la structuration des filières agricoles. Associant représentants d’institutions professionnelles et pouvoirs publics, il a notamment été le moteur de la création et de la consolidation des appellations et labels de qualité, en même temps que le levier de création des interprofessions, notamment dans le domaine des vins et spiritueux.
C’est un décret-loi 1935 du 30 janvier 1935 (IIIe République) qui institue «un comité national des appellations d’origine de vins et eaux-de-vie qui est doté de la personnalité civile» (art. 20) ainsi qu’«une catégorie d’appellations d’origine dite “contrôlées”» (art. 21). Dans un nouveau contexte de crise agricole, qui donnera parallèlement naissance aux grands offices agricoles (Office national du blé, devenu Office national interprofessionnel des céréales en 1940, aujourd’hui regroupés dans l’établissement France Agrimer), le comité a vocation a assurer «la défense du marché des vins et le régime économique de l’alcool».
Autour du couple qualification des produits/répression des fraudes
Porté notamment par le parlementaire et ministre de l’Agriculture, par ailleursprofessionnel viticole en Bordelais, Joseph Capus, le projet permet de structurer une législation sur la qualité des productions agricoles dont l’ébauche remonte au milieu du XIXe siècle, essentiellement centrée sur la répression des fraudes et sur une hiérarchisation qualitative des produits, dont sont entre autres issues la loi de 1889 sur la définition légale du vin, surtout, la loi du 1er août 1905 qui esquisse la notion d’appellation d’origine contrôlée, confortée par le statut viticole de 1931.
Quoique d’initiative gouvernementale, le texte est censé répondre à une mobilisation des organisations professionnelles, dont la loi sur les syndicats de 1884 a permis le développement, tandis qu’un pouvoir réglementaire général se substitue à la décision ad hoc des tribunaux dans l’appréciation des fraudes. A l’amont, la qualification des produits, pour l’heure essentiellement viticoles, se précise en couplant les critères d’origine géographique et de qualités propres qui signent une originalité.
Nonobstant des conflits, peu nombreux mais sensibles, entre professionnels et CNAO, c’est aussi l’interprofession qui s’esquisse à partit du secteur des vins. Durant la période d’Occupation, le comité connaîtra une activité périodique, étroitement corrélée à la Corporation paysanne et sous contrôle étroit de l’exécutif. Il retrouve sa forme institutionnelle originale par décret du 16 juillet 1947 (Ve République) qui le confirme par dans ses attributions sous la nouvelle appellation d’Institut national des appellations d’origine. Dans une période de développement et de démocratisation des AOC, par ailleurs appréciés aussi sur la base du critère économique, une nouvelle fois entre crise (1953) et relance par l’initiative publique, l’INAO voit conforter sa légitimité de garant de l’ensemble des vins français (AOC, mais aussi VDQS) sous signe de qualité, tandis que sa gouvernance intègre la représentation du commerce et de la distribution.
La légitimation croissante de l'action de l’INAO sur un périmètre des productions de qualité élargi
La vocation de l’INAO s’est étendue, depuis, sous le double plan de la mission et du périmètre couverts, soutenue d’ailleurs par la réglementation européenne (fortement inspirée des exemples français et italiens). La loi n°90-558 du 2 juillet 1990 étend la notion d’AOC, relevant de sa compétences, a d’autres produits que la viticulture. Celle du 3 janvier 1994 harmonise les règles nationales sur les importantes dispositions européennes de 1992 concertant la protection et la promotion des produits alimentaires régionaux (création des AOP, IGP, Spécialité traditionnelle garantie). La loi d’orientation agricole du 9 juillet 1999 fixe 4 signes d’identification de la qualité et de l’origine: AOC, label, certification de conformité produits et certification du mode de production biologique.
Création de l’Institut de l’origine et de la qualité en 2006
Une nouvelle étape est franchie avec l’ordonnance du 7 décembre 2006 qui transforme l’INAO en Institut de l’origine et de la qualité (modifiant l’article. L. 642-5. du Code rural), en tant qu’établissement public administratif ayant pour missions d’assurer la reconnaissance des produits et des organismes, la politique et les modalités de contrôle, la défense et la promotion des signes d’identification en France et à l’étranger. Cette mission s’applique à l’ensemble des produits de l’agriculture et de la mer, dont le texte balise les signes d’identification en 3 niveaux hiérarchisés :
1) SIQO: label rouge, appellation d’origine, indication géographique protégée, spécialité traditionnelle garantie, agriculture biologique (sur cahier des charges validé par l’INAO, attribué par arrêté)
2) mentions valorisantes: «Montagne », «fermier», «produit de la ferme», «produit à la ferme», «vin de pays» et des termes «produits pays» (fixée par décret);
3) certification de conformité (fixée par décret).
Un corollaire important du texte réside en la création des organismes de défense et de gestion (ODG) compétents pour demander l'octroi d'un signe d’identification de la qualité et de l’origine, qui doivent désigner un organisme de contrôle habilité ensuite par l’Institut. L’INAO référence actuellement environ 460 ODG, à parité entre les organismes de la filière viticole et des autres filières agricoles. Les appellations sont reconnues, par ordre d’importance, dans les filières viandes/volailles, fruits/légumes, lait/fromage. Près de 1200 produits sont labellisés SIQO, majoritairement comme Label Rouge et IGP en filière non viticole, AOC/AOP et IGP pour les vins, AOC/AOP (Europe) et IG (Europe) pour les alcools autres. Généralement, les ODG couvrent un produit unique, mais plus d’une quinzaine font accréditer de 20 à 10 appellations et près d’une trentaine de 10 à 5 produits.
La gouvernance de l’établissement associe toujours les pouvoirs publics et des professionnels (200) désignés par l’autorité publique. Son organe de direction est un Conseil permanent, présidé par un professionnel (depuis 2017, Jean-Louis Piton) sur le principe d’une alternance entre filières et régions. Le traitement des dossiers de reconnaissance déposés par les ODG, de la validation au contrôle, relève 5 comités nationaux couvrant respectivement les AOC vins et spiritueux; les AOP laitières, agroalimentaires et forestières; les IGP, labels et STD; les IGP vins et cidres; l’agriculture biologique. 8 délégations régionales assurent la présence de l’Institut sur le territoire. Le financement de l’établissement est assuré par une dotation de la tutelle (ministère de l’Agriculture), le revenu de droits perçus sur les SIQO ou de redevances.