1892: naissance de la Fédération nationale des bourses du travail (FNBT)

Les bourses du travail sont à l’origine du mouvement syndical français. Supplantées par les syndicats, au premier rang desquels la CGT, elles restent néanmoins un support mis à leur disposition et, plus largement aujourd’hui, un lieu du rassemblement social.


Le mouvement des bourses du travail, à la fois bureau de placement des travailleurs et support de l’activité syndicale territoriale et généraliste (par rapport aux syndicats de métiers), se développe à partir de la loi du 21 mars 1884 relative à la création des syndicats professionnels. L’idée en avait été conçue, dès les années 1850, par un journaliste économique proche de Frédéric Bastiat, Gustave de Molinari, sur le modèle des bourses de valeurs.

Du concept libéral au support syndical

Le concept libéral, impliquant une autonomie radicale par rapport à l’État, sera concrétisé en France par les animateurs du mouvement anarcho-syndicaliste, au premier rang desquels Fernand Pelloutier, qui revendiquent également cette autonomie mais l’infléchissent dans un sens plus socialiste. L’objet de l'institution professionnelle ne se limite plus au simple bureau de placement, mais à la mutualisation de moyens entre organisations syndicales ou entre travailleurs et, surtout, à un dispositif (bibliothèque, espaces d’échanges, de formation) favorisant l’émancipation des travailleurs et l’abolition du capitalisme

La fusion avec la CGT

C’est à Paris que sera inauguré en 1887 le premier bâtiment, concrétisant un projet initié en 1882. Le mouvement gagne rapidement les grandes villes du pays avec l’ouverture de nouveaux édifices à Toulouse et Marseille (1887), Nice et Nantes (1892), Lyon et Lille (1896). En 1992, se constitue une Fédération nationale des bourses du travail de France et des Colonies (FBdT). Grâce au soutien des municipalités, les établissements se multiplient dans les premières années du XXe siècle, et les locaux sont mis au service des différentes confédérations syndicales, au premier rang desquelles la Confédération générale du travail. Le rapprochement avec le mouvement syndical ne s’est pas opéré sans difficulté. La FBdT fusionne, dès 1902, avec la CGT créée en 1895. Les bourses deviendront ainsi un important support logistique pour la centrale et, progressivement, le siège de ses unions départementales.

Un lieu de rassemblement social

La vocation originelle des bourses «associationnistes» s’efface ainsi devant la montée en puissance des syndicats «institutionnalistes» à proprement parler, même si elles auront vocation à en être le support. La construction où la mise à d’un bâtiment dédié dépend, par ailleurs, des orientations des municipalités et de leurs affinités avec le syndicats et pas exclusivement la CGT. Dans les années récentes, la vocation des lieux s’est élargie à l’accueil de multiples formes de rassemblement social, militant, associatif, festif.

La Bourse du travail de Paris est aujourd’hui (délibération du conseil de Paris du 25 juin 1970 modifiée par délibération du 19 novembre 1979) un établissement public administratif de la ville géré par une commission administrative composée de délégués désignés par les organisations syndicales (CGT, CFDT, CFTC, CFE/CGC, CGT-FO, UNSA, Solidaires). À Lille, la bourse réinstallée depuis 2013 dans une ancienne usine accueille également les différentes organisations syndicales. À Marseille, il existe deux bourses, illustration de la scission au sein de la CGT en 1948, Force ouvrière occupant la plus ancienne, tandis que la CGT occupe celle construite en 1936.

À Lyon, l’activité syndicale de la CGT, la CFDT et la FSU, cohabite avec une salle de spectacle. À Toulouse, la bourse du travail abrite toujours le siège de l’UD CGT 31, l’Institut d’histoire sociale, malgré un conflit avec la municipalité en 2015, ainsi qu’une radio, une salle de spectacles. À Bordeaux, le Palais du travail abrite l’UD CGT. À Nice, les locaux du Palais communal ont abrité, jusqu’en 2009, le siège de la CGT, pour devenir ensuite un musée municipal. Ce changement d’affectation a donné lieu à un conflit entre la municipalité et le syndicat. À Nantes, l’ensemble des centrales disposent depuis 2001 d’une Maison des syndicats, après avoir déménagé de l’ancienne bourse.

 

Sources et références principales
- «Les Bourses du travail», Gustave de Molinari, Guillaumin éditeur, 1893, édition actualisée chez Forgotten Books, 2018
- «Histoire des Bourses du travail», Fernand Pelloutier,  1901, réédition aux Éditions des archives contemporaines, 1971, accessible en ligne sur BNF Gallica
- Wikipedia: article «Bourse du travail»
- Sites : Confédération nationale du travail, bourse du travail de Paris,  ville de Bordeaux, bourse du travail de Lyon, site de l’Île de Nantes, Nice rendez-vous, Nice Matin (archives 2012), 20 Minutes Lille (archives 2014), FO Haute-Garonne, UD CGT 31