L’ordonnance 45-2250 du 4 octobre 1945 portant création de la sécurité sociale est sans aucun doute le texte emblématique du modèle social français, à la fois par son contenu et par le principe d’une gouvernance partagée entre institutions professionnelles et pouvoirs publics. Il est présenté ici dans sa version originale intégrale.
NOTA
Année 1945 – Législation du Gouvernement provisoire de la République, sous la présidence de Charles de Gaulle. Le Conseil national de la résistance avait intégré à son programme la mise en œuvre d’un plan complet de sécurité sociale, avec gestion assurée conjointement par les représentants des intéressés (salariés, employeurs, travailleurs indépendants) et de l’État (notamment le ministère du Travail et de la Sécurité sociale).
Un système original
Le projet s’inspire de deux modèles développés en Allemagne (à l’initiative d’Otto von Bismarck) et Angleterre (dû à William Beveridge) et, plus spécifiquement du premier. D’abord en organisant le financement sur la base de «cotisations (…) assises sur l’ensemble des salaires ou gains perçus par les bénéficiaires de chacune des législations» (art. 31). Ensuite, en organisant la gestion des caisses sur un mode paritaire (patronat, syndicats). Il traduit également une évolution préfigurée par les lois du 8 avril 1898 sur les sociétés de secours mutuel, du 5 avril 1910 sur les retraites ouvrières, du 5 mars 1928 et du 30 avril 1930 sur les assurances sociales obligatoires, ainsi que par le décret-loi du 12 novembre 1938 sur les allocations familiales. La mise en application est programmée pour partie en 1946 et début 1947, avec mention de dispositions transitoires pour les allocations familiales et certains statuts. Le projet d’unifier le système ne se réalisera que partiellement et des règles spécifiques seront consenties aux salariés non agricoles (ordonnance du 19 octobre 1945), professions réglementées, (loi de 1948 sur les organisations autonomes d’assurance vieillesse) ou bénéficiant de régimes dits «spéciaux», aux cadres (création de l’Agirc en 1947), aux professions agricoles (lois de 1952, 1961, 1966, 1975 consolidant les attributions de la Mutualité sociale agricole).
La notion de «sécurité sociale» est caractérisée (art.3), en tant que couvrant les risques « maladie, maternité et décès ; accident du travail et de maladie professionnelle » et offrant une prestation « d’allocations familiales» et de «salaire unique». L’opérateur de la sécurité sociale est organisé en trois échelons (Titre II, art. 2 à 18): la caisse primaire de sécurité sociale et la caisse régionale ont des attributions (risques couverts, gestion) complémentaires; la caisse nationale, qui a statut d’établissement public, est en charge d’assurer la pérennité financière du régime, y compris concernant les caisses d’allocation familiales. En outre, il est créé un Conseil supérieur de la sécurité sociale (art. 28) à gouvernance paritaire élargie (organisations professionnelles, pouvoirs publics) habilité à émettre des avis sur toutes questions relatives au système. Les allocations familiales sont intégrées au système (chap.5 art. 19 à 29) via des structures autonomes (CAF, Commission supérieure des allocations familiales) sur le modèle des caisses de secours mutuel. Le Titre V (art. 43 à 59) notifie le régime de sanctions applicables aux contrevenants, sous l’égide de la justice civile (tribunal de paix, tribunal correctionnel).
L'emblème du modèle social français
Emblème du modèle social français, la «Sécu» (attributions, organisation) a du néanmoins être adaptée à l’évolution socio-économique. Ainsi notamment de la loi du 22 février 1996 introduisant dans la Constitution de 1958 une nouvelle catégorie de lois dites de «Financement de la sécurité sociale», qui sera précisée par la loi organique du 22 juillet 1996 (créant notamment l’Ondam). Ainsi encore des textes suivants:
- Ordonnance du 21 août 1967 créant des caisses différenciées pour les branches vieillesse, maladie, allocations familiales, mais marquant surtout une reprise en main par les pouvoirs publics suivant une logique plus libérale qu’en 1945;
- Loi du 28 juillet 1999 créant une couverture maladie universelle (CMU);
- Loi de Finances pour 1991 créant la contribution sociale généralisée (CSG), c’est-à-dire une fiscalisation plus proche du modèle de Beveridge et correspondant, corrélativement, à un renforcement de la tutelle administrative.
- Loi du 13 août 2004 portant réforme de l’assurance maladie (réforme de la gouvernance…).
- Loi du 2 août 2005, dite «LOLSS» qui approfondit les aspects de 1996 : fixation de résultat et contrôle par la représentation nationale.
- Ordonnance du 31 mars 2005 (entrée en vigueur en 2006) créant le régime social des indépendants (RSI). Depuis 2018, ce régime est intégré au régime général.
Le système originel pourrait être entièrement transformé prochainement. Le programme porté par le nouveau Président de la République ne fait pas mystère d’instaurer un régime unique de sécurité sociale, fiscalisé, d’inspiration plus clairement beveridgienne. Plusieurs ordonnances ont été déjà été adoptées, d’autres sont en cours de négociation, non sans soulever des questions — abandon du modèle social, mise hors jeu des partenaires sociaux.
Ordonnance 45-2250 du 4 octobre 1945 portant création de la sécurité sociale (1)
Le Gouvernement provisoire de la République française,
Sur le rapport du ministre du travail et de la sécurité sociale,
Vu l’ordonnance du 3 juin 1943 portant institution du Comité français de la libération nationale, ensemble les ordonnances des 3 juin et 4 septembre 1944;
Vu l’ordonnance du 9 août 1944, portant rétablissement de l’égalité républicaine sur le territoire continental, ensemble les ordonnances subséquentes,
Vu le décret du 2 octobre 1945 relatif à l’exercice de la présidence du gouvernement provisoire de la République française pendant l’absence du Général de Gaulle,
Vu l’urgence constatée par le président du Gouvernement,
Le Conseil d’État (commission permanente) entendu :
Ordonne
Titre Ier – Dispositions générales
Article 1 (2)
Il est institué une organisation de la sécurité sociale destinée à garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, de couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu’ils supportent. L’organisation de la sécurité sociale assure dès à présent le service des prestations prévues par les législations concernant les assurances sociales, l’allocation aux vieux travailleurs, les accidents du travail et maladies professionnelles et les allocations familiales, et de salaire unique aux catégories de travailleurs protégés par chacune de ces législations dans le cadre des prescriptions fixées par celles-ci et sous réserve des dispositions de la présente ordonnance. Des ordonnances ultérieures procéderont à l’harmonisation desdites législations et pourront étendre le champ d’application de l’organisation de la sécurité sociale à des catégories nouvelles de bénéficiaires, et à des risques ou prestations non prévus par les textes en vigueur.
Titre II – Organisation technique et financière
Article 2
L’organisation technique et financière de la sécurité sociale comprend:
• des caisses primaires de sécurité sociale,
• des caisses régionales de sécurité sociale,
• une caisse nationale de sécurité sociale,
• des organismes spéciaux à certaines branches d’activité ou entreprises,
• à titre provisoire, pour la période au cours de laquelle seront adaptés à leur mission les autres services prévus par la présente ordonnance, des organismes propres à la gestion des allocations familiales et de salaire unique.
Chapitre 1er – Les caisses primaires de sécurité sociale
Article 3
Les caisses primaires de sécurité sociale assurent:
a) la gestion des risques maladie, maternité et décès;
b) la gestion des risques d’accident du travail et de maladie professionnelle en ce qui concerne les incapacités temporaires;
c) à compter d’une date qui sera fixée par décret pris sur le rapport du ministre du travail et de la sécurité sociale, et du ministre de la santé publique, le service des allocations familiales et de salaire unique.
Article 4
La circonscription et le siège de chaque caisse primaire sont fixés par arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale. Sont affiliés à la caisse primaire tous les travailleurs soumis aux législations de la sécurité sociale et dont le lieu de travail se trouve dans la circonscription de la caisse. Un arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale fixe la liste des catégories de bénéficiaires qui sont affiliés à la caisse dans la circonscription de laquelle se trouve le lieu de leur résidence. Lorsqu’un bénéficiaire réside en dehors de la circonscription de la caisse à laquelle il est affilié, le service des prestations lui est fait, pour le compte de ladite caisse, par la caisse du lieu de résidence ou une section de celle-ci.
Article 5
La caisse primaire de sécurité sociale est administrée par un conseil d’administration comprenant:
* pour les 2/3 des représentants des travailleurs relevant de la caisse, désignés par les représentants des organisations syndicales les plus représentatives et parmi lesquels un ou deux représentants des personnels de la caisse, le tiers au moins d’entre eux devant être père ou mère de famille;
* pour 1/3 des représentants des employeurs désignés par les organisations les plus représentatives, des représentants des associations familiales constituées conformément à l’ordonnance du 3 mars 1945, et des personnes connues pour leurs travaux sur les assurances sociales et les accidents du travail, ou par le concours donné à l’application de ces législations.
En outre, le conseil d’administration désigne, sur des présentations en nombre double, des organisations professionnelles intéressées, deux praticiens qui lui sont adjoints avec voix délibérative. Le règlement général d’administration publique détermine les règles applicables à la désignation des représentants des associations familiales et des personnes connues pour leurs travaux, ainsi qu’à la désignation des organisations les plus représentatives.
Article 6
En vue du service des prestations, les caisses primaires peuvent créer des sections et faire appel aux sociétés de secours mutuels pour la gestion desdites sections.
Article 7
Il est créé obligatoirement une section pour chaque agglomération comptant au moins deux mille assurés, distincte de la ville où la caisse a son siège, ainsi que dans tous les cas où il en est ainsi décidé par le ministre du travail et de la sécurité sociale, après avis du conseil supérieur de la sécurité sociale.
Article 8
Chaque section est administrée par un conseil d’administration dont les membres sont désignés dans les conditions prévues par le règlement général d’administration publique.
Article 9
Les caisses primaires de sécurité sociale sont constituées et fonctionnent conformément aux prescriptions de la loi du 1er avril 1898 sur les sociétés de secours mutuel, sous réserve des dispositions de la présente ordonnance et des textes pris pour son application. Les sections sont soumises aux mêmes prescriptions dans la limite des pouvoirs et de la compétence qui leur sont fixés par la présente ordonnance et le règlement général d’administration publique pris pour son application.
Chapitre 2 – Les caisses régionales de sécurité sociale
Article 10
Les caisses régionales de sécurité sociale ont pour rôle:
1° – De gérer les risques d’invalidité et de vieillesse, de promouvoir et de coordonner la prévention de l’invalidité;
2° – De gérer les risques d’accidents du travail et de maladie professionnelle en ce qui concerne les incapacités permanentes, de coordonner la gestion desdits risques pour la région, et de promouvoir et coordonner la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles.
3° – D’assurer la compensation régionale des charges des risques gérés par les caisses primaires de sécurité sociale et de garantir la solvabilité de celles-ci;
4° – À compter de la date prévue à l’article 3 c) ci-dessus, d’assurer la compensation régionale des charges d’allocations familiales;
5° – D’organiser et de diriger le contrôle médical pour l’ensemble de la région.
6° – De promouvoir et d’organiser l’action sanitaire et sociale de l’ensemble des caisses de sécurité sociale pour toute la région, dans le cadre de l’organisation générale établie par le ministre de la santé publique, et selon les directives de celui-ci.
La circonscription et le siège de chaque caisse régionale de sécurité sociale sont fixés par arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale. Dans chaque région, une commission composée de représentants du ministre de la santé publique, de représentants du ministre du travail et de la sécurité sociale, et des organismes de sécurité sociale définit, conformément au plan général établi par le ministre de la santé publique, le cadre dans lequel peur s’exercer l’action sanitaire et sociale des organismes de sécurité sociale. Les modalités d’application des dispositions prévues à l’alinéa précédent sont fixées par un décret rendu sur le rapport du ministre du travail et de la sécurité sociale et du ministre de la santé publique.
Article 11
La caisse régionale de sécurité sociale est administrée par un conseil d’administration de 26 membres, à savoir:
* 14 membres désignés parmi les conseils d’administration des caisses primaires parmi les représentants des travailleurs;
* 8 membres désignés par ces mêmes conseils d’administration parmi les représentants des employeurs et des associations familiales constituées conformément à l’ordonnance du 3 mars 1945 et parmi les personnes connues pour leurs travaux ou pour les services rendus à la sécurité sociale;
* 2 représentants des personnels de la caisse désignés par les organisations syndicales représentatives;
* 2 praticiens choisis par le conseil sur une liste double présentée par leurs organisations syndicales.
Il est constitué, auprès du conseil d’administration, et par branches ou groupes de branches d’activités, des comités techniques composés par parties égales de représentants des organisations professionnelles de travailleurs et d’employeurs et chargés de l’assister dans la gestion des risques d’accident du travail et de maladie professionnelle.
Article 12
Les caisses régionales de sécurité sociale sont constituées et fonctionnent conformément aux prescriptions de la loi du 1er avril 1898 sur les sociétés de secours mutuels sous réserve des dispositions de la présente ordonnance et des textes pris pour son application.
Article 13
Les caisses primaires ou régionales de sécurité sociale peuvent se grouper en unions ou fédérations en vue de créer des œuvres ou des services d’intérêt commun. Elles peuvent être tenues de le faire dans les conditions fixées par un arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale pris après avis du Conseil supérieur de la sécurité sociale institué à l’article 28 ci-après. Ces unions ou fédérations sont constituées et fonctionnent dans les conditions fixées à l’article 12 ci-dessus.
Chapitre 3 – Caisse nationale de sécurité sociale
Article 14
La Caisse nationale de sécurité sociale a pour rôle:
1° – d’assurer la compensation nationale des risques gérés par les caisses régionales de sécurité sociale et de garantir la solvabilité de ces caisses dans la limite des ressources prévues par la présente ordonnance;
2° – d’assurer la compensation nationale des charges des allocations familiales et de salaire unique;
3° – de gérer les fonds destinés à promouvoir, sur le plan national, une politique générale de la sécurité sociale et notamment:
– un fonds de prévention des accidents du travail et maladies professionnelles;
– un fonds d’action sanitaire et sociale;
4° – de couvrir les charges de l’allocation aux vieux travailleurs salariés non assurés sociaux ou non assurés des retraites ouvrières et paysannes, dans les conditions prévues par l’ordonnance du 30 décembre 1944.
Article 15
La Caisse nationale de sécurité sociale est administrée par un conseil d’administration comprenant:
* un président de section du Conseil d’État ou un conseiller d’État désigné par le vice-président du Conseil d’État, président;
* deux représentants du ministre de la santé publique, dont l’un au titre du secrétariat général à la famille et à la population;
* un représentant du ministère de l’éducation nationale;
* un représentant du ministre des finances;
* le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations;
* 3 membres élus par le conseil supérieur de la sécurité sociale, dont 2 travailleurs;
* 2 membres élus par le conseil national des allocations familiales, dont 1 travailleur;
* 15 représentants élus des caisses régionales de sécurité sociale, dont 10 travailleurs et 5 choisis par les représentants des employeurs et des associations familiales constituées conformément à l’ordonnance du 3 mars 1945 et parmi les personnes connues pour leurs travaux ou pour les services rendus dans le domaine de la sécurité sociale;
* 6 représentants élus des caisses d’allocations familiales, dont 3 salariés, 1 travailleur indépendant et 2 employeurs.
À l’expiration de la période mentionnée à l’article 2 ci-dessus, le nombre des représentants élus des caisses régionales est porté à 21, dont 14 travailleurs. Il est de plus constitué auprès du conseil d’administration un comité de gestion pour chaque fonds géré par la caisse nationale de sécurité sociale et ayant une affectation spécialisée, et notamment pour le fonds de prévention des accidents du travail et maladies professionnelles, et pour le fonds d’action sanitaire et sociale.
Article 16
La Caisse nationale de sécurité sociale est un établissement public. Elle jouit de l’autonomie financière. Elle est soumise au contrôle du ministre du travail et de la sécurité sociale et du ministre de l’économie nationale et des finances. Les décisions qui concernent des réalisations d’ordre sanitaire ou des subventions à des institutions ou œuvres d’ordre sanitaire ne peuvent être prises que dans le cadre d’un programme fixé par le ministre du travail et de la sécurité sociale et le ministre de la santé publique après avis favorable de celui-ci.
Chapitre 5 – Caisses d’allocations familiales
Article 19
La gestion des allocations familiales est assurée, pour la période mentionnée à l’article 2 ci-dessus, par des caisses d’allocations familiales dont la circonscription et le siège sont fixés par arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale, compte tenu des circonscriptions territoriales des caisses primaires de sécurité sociale.
Article 20
Sont affiliés à la caisse d’allocations familiales tous les employeurs dont l’établissement se trouve situé dans la circonscription ainsi que les travailleurs indépendants qui y exercent leur activité.
Article 21
Chaque caisse d’allocations familiales assure le service des allocations familiales et de salaire unique:
a) aux employeurs et travailleurs indépendants visés à l’article précédent;
b) aux travailleurs occupés par lesdits employeurs.
Elle doit tenir une comptabilité distincte pour la gestion des allocations familiales servies aux travailleurs indépendants. Des arrêtés du ministre du travail et de la sécurité sociale peuvent apporter des dérogations aux dispositions du présent article pour certaines catégories de travailleurs en raison des conditions particulières de leur travail.
Article 22
La caisse d’allocation familiale est administrée par un conseil d’administration comprenant:
* pour la moitié, des représentants des travailleurs salariés;
* pour 1/6 des représentants de travailleurs indépendants;
* pour 2/6, des représentants des employeurs.
Les administrateurs sont choisis parmi les bénéficiaires auxquels la caisse assure le service des allocations. Ils sont désignés, pour chacune des trois catégories précitées, par les organisations les plus représentatives. Ils peuvent également s’adjoindre trois personnes connues pour leurs travaux sur les questions démographiques, ou leurs activités en faveur de la famille.
Article 23
Les caisses d’allocations familiales sont constituées et fonctionnent conformément aux prescriptions de la loi du 1er avril 1898 sur les sociétés de secours mutuels, sous réserve des dispositions de la présente ordonnance et des textes pris pour son application. Elles peuvent constituer des fédérations avec les caisses de sécurité sociale de leur circonscription respective en vue de la création de services d’intérêt commun. Les fédérations doivent être constituées pour la gestion des services sociaux existant à la date d’entrée en vigueur de la présente ordonnance.
Article 24
La compensation entre les caisses d’allocations familiales est assurée par une section spéciale de la Caisse nationale de sécurité sociale dans les conditions fixées par le règlement général d’administration publique.
Titre III – Organisation administrative
Article 25
• Paragraphe 1er – Des directions régionales de la sécurité sociale, substituées aux services régionaux des assurances sociales, assurent, sous l’autorité du ministre du travail et de la sécurité sociale, qui en fixe la circonscription et le siège, l’application de l’ensemble de des législations de sécurité sociale dans la mesure définie par l’article 1er de la présente ordonnance et les ordonnances complémentaires à venir.
• Paragraphe 2 – Les directions régionales sont notamment chargées de veiller à l’observation des obligations incombant tant aux employeurs qu’aux bénéficiaires en ce qui concerne l’affiliation et le versement des cotisations.
• Paragraphe 3 – Les directions régionales procèdent à la liquidation des allocations aux vieux travailleurs salariés non assurés sociaux et non assurés des retraites ouvrières et paysannes. En outre, elles peuvent être chargées, par arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale, du paiement des allocations pour le compte de la caisse nationale de sécurité sociale.
• Paragraphe 4 – Les directions régionales contrôlent la gestion des caisses primaires et régionales de sécurité sociale et des caisses d’allocations familiales.
Les décisions des conseils d’administration des caisses d’allocations familiales et des caisses primaires et régionales de sécurité sociale sont communiquées immédiatement au directeur régional de la sécurité sociale qui peut, dans les 8 jours de cette communication, demander que celles desdites décisions qui lui paraissent contraires à la loi ou de nature à compromettre l’équilibre financier de la caisse, aient leur exécution suspendue jusqu’à décision ministérielle. Si celle-ci n’intervient pas dans le délai d’un mois à compter de ladite demande, la décision du conseil d’administration prend son entier effet. Les décisions concernant l’action sanitaire sont communiquées par le directeur régional de la sécurité sociale au directeur régional de la santé et de l’assistance aux fins d’observations éventuelles. Le délai de 8 jours prévus à l’alinéa précédent est porté à 15 jours à l’égard desdites décisions.
Article 26
En cas d’irrégularités graves, de mauvaise gestion ou de carence du conseil d’administration d’une caisse d’allocations familiales ou d’une caisse primaire ou régionale de sécurité sociale, ce conseil peut être suspendu ou dissous par un arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale, qui nomme un administrateur provisoire. Si les irrégularités ou la mauvaise gestion sont imputables à un ou plusieurs membres du conseil d’administration, ceux-ci peuvent être révoqués, après avis dudit conseil, par arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale.
Article 27
Il est institué, au ministère du travail et de la sécurité sociale, une direction générale de la sécurité sociale, chargée de l’application de l’ensemble des législations de sécurité sociale, et qui est substituée à la direction générale des assurances sociales. La direction générale de la sécurité sociale dispose, pour l’accomplissement de sa mission, en outre des services de l’administration centrale, d’un service de contrôle général de la sécurité sociale assurant le contrôle sur place des différents services et caisses.
Article 28
Il est institué, au ministère du travail et de la sécurité sociale, un Conseil supérieur de la sécurité sociale, qui remplace le Conseil supérieur des assurances sociales et qui est composé de:
* pour ½ de représentants des caisses régionales de la sécurité sociale, parmi lesquels 2/3 de travailleurs, y compris des représentants du personnel des caisses, et 1/3 d’employeurs ou de personnes connues pour leurs travaux ou pour les divers services rendus dans le domaine de la sécurité sociale;
* pour ¼ de représentants des organisations nationales d’employeurs, de salariés, de praticiens et des associations familiales, constituées conformément à la loi du 3 mars 1945;
* pour ¼ de représentants des administrations publiques intéressées, des représentants du personnel des services et de personnes au concours desquelles il sera décidé de faire appel en raison de leur compétence particulière.
Le règlement général d’administration publique détermine les règles applicables à la désignation des membres du conseil supérieur ainsi qu’au fonctionnement de ce conseil. Le conseil supérieur de la sécurité sociale est chargé d’émettre un avis sur toutes les questions sont il est saisi par le ministre du travail et de la sécurité sociale. Il exerce, en outre, les attributions dévolues antérieurement au conseil supérieur des assurances sociales. Il est institué, auprès du conseil supérieur de la sécurité sociale, un comité technique d’action sanitaire et sociale, dont la composition et les attributions sont fixées par un décret contresigné par le ministre du travail et de la sécurité sociale et le ministre de la santé publique.
Article 29
La Commission supérieure des allocations familiales instituée à l’article 74 L du livre 1er du Code du travail est réorganisée ainsi qu’il suit. Elle est composée:
* pour ¼ de représentants des caisses, parmi lesquels les 2/3 de travailleurs y compris les représentants du personnel des caisses;
* pour ¼ de représentants de l’union nationale des associations familiales constituées conformément à l’ordonnance du 3 mars 1945;
* pour ¼ de représentants des organisations professionnelles nationales d’employeurs, de salariés et de travailleurs indépendants;
* pour ¼ de représentants des administrations publiques intéressées, de représentants du personnel des services et de personnes auxquelles il sera décidé de faire appel en raison de leur compétence particulière.
Le règlement d’administration publique générale détermine les règles applicables à la désignation des membres de la commission supérieure ainsi qu’au fonctionnement de cette commission. La commission supérieure des allocations familiales est chargée d’émettre un avis sur toutes les questions dont elle est saisie par le ministre du travail et de la sécurité sociale.
Titre IV – Ressources
Article 30
La couverture des charges de la sécurité sociale, à titre provisoire et jusqu’à l’établissement d’une cotisation unique, est assurée, indépendamment des contributions de l’État prévues par les dispositions législatives et réglementaires en vigueur, par des cotisations assises et recouvrées conformément aux dispositions ci-après.
Article 31
Les cotisations des assurances sociales, des allocations familiales et des accidents du travail, sont assises sur l’ensemble des salaires ou gains perçus par les bénéficiaires de chacune des législations. Toutefois, les rémunérations dépassant 12 000 francs par an ne sont comptées que pour ce montant. Le règlement général d’administration publique détermine les modalités particulières applicables au calcul des cotisations dues par les non salariés.
Article 32
Le taux de la cotisation des assurances sociales est de 12%. La moitié de la cotisation est à la charge de l’employeur, l’autre moitié à la charge du salarié ou assimilé. Des taux forfaitaires de cotisations peuvent être fixés par arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale pour certaines catégories de salariés ou assimilés. La contribution ouvrière est préemptée sur le salaire ou gain de l’assuré lors de chaque paye.
Le salarié ne peut s’opposer au prélèvement de cette contribution. Le paiement du salaire effectué sous déduction de la retenue de la contribution ouvrière vaut acquit de cette contribution à l’égard du salarié de la part de l’employeur. L’assuré est tenu de verser entre les mains de l’employeur sa contribution sur les sommes perçues par lui directement ou par l’entremise d’un tiers, à titre de pourboires. Le non-versement de cette contribution est une cause de résiliation du contrat de travail. La contribution de l’employeur reste exclusivement à sa charge, toute convention contraire étant nulle de plein droit. Le taux de cette contribution peut être relevé par arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale et du ministre de l’économie nationale et des finances, dans une mesure égale à la réduction dont le taux de la contribution spéciale prévue par l’ordonnance du 30 décembre 1944 aura été l’objet.
Article 33
Si le travailleur à domicile, rémunéré à façon, aux pièces ou à la tâche, est lui-même assuré obligatoire, vis-à-vis du fabricant pour le compte duquel il travaille, il n’est point tenu au versement des contributions patronales afférentes à l’emploi des ouvriers qui travaillent avec lui pour ledit fabricant. Ces contributions sont à la charge du fabricant et calculées d’après les déclarations de salaire fournies à ce dernier. Le salaire propre au travailleur à domicile est obtenu en déduisant de la rémunération globale versée par l’employeur d’une part, les salaires des personnes travaillant avec lui, d’autre part, s’il y a lieu, le montant des frais d’atelier fixés forfaitairement par arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale.
Article 34
La cotisation des allocations familiales est intégralement à la charge de l’employeur. Le taux de cette cotisation est fixé suivant les modalités déterminées par un arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale et du ministre de l’économie nationale et des finances.
Article 35
La cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est à la charge exclusive de l’employeur. Le taux de la cotisation est déterminé annuellement pour chaque catégorie de risques par la caisse régionale de sécurité sociale, d’après les règles fixées par arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale et du ministre de l’économie nationale et des finances. Les risques sont classés dans les différentes catégories par la caisse régionale, sauf recours de la part soit de l’employeur, soit du directeur régional, à une commission constituée auprès du conseil supérieur de la sécurité sociale et dont l’organisation et le fonctionnement sont fixés par le règlement général d’administration publique.
La caisse régionale peut appliquer des ristournes sur les cotisations ou imposer des cotisations supplémentaires dans les conditions qui seront fixées par un arrêté du ministre du travail ou de la sécurité sociale, pour tenir compte des mesures de prévention ou de soins prises par l’employeur ou des risques exceptionnels présentés par l’exploitation. La décision de la caisse est susceptible de recours devant la commission prévue à l’alinéa précédent. En cas de carence de la caisse, le directeur régional peut statuer sauf recours devant ladite commission. Le classement d’un risque dans une catégorie peut être modifié à toute époque. L’employeur est tenu de déclarer à la caisse régionale toutes circonstances de nature à aggraver les risques.
Article 36
L’ensemble des cotisations prévues aux articles 31 à 35 ci-dessus et de la contribution spéciale prévue par l’ordonnance du 30 décembre 1944, fait l’objet d’un versement unique par l’employeur ou, le cas échéant, par le travailleur indépendant, à la caisse primaire de sécurité sociale dans les 15 premiers jours de chaque trimestre si l’employeur compte moins de 10 salariés ou s’il s’agit d’un travailleur indépendant, dans les 15 premiers jours de chaque mois dans les autres cas. En cas de cession ou de cessation d’un commerce ou d’une industrie ; le paiement des cotisations pour le trimestre ou le mois en cours, suivant le cas, est immédiatement exigible.
Les versements qui ne sont pas effectués dans le délai ou à l’époque ci-dessus prévus sont passibles d’une majoration de 1°/°° par jour de retard, payable en même temps que les versements. Le paiement de ces cotisations est garanti pour l’année échue et ce qui est dû pour l’année courante par un privilège sur les biens meubles et immeubles du débiteur, lequel privilège prend rang concurremment avec celui des gens de service et celui des ouvriers établis respectivement par l’article 2101 du Code civil et l’article 549 du Code du commerce.
Article 37
Dans les 15 premiers jours de chaque trimestre, toute personne qui a effectué un versement de cotisations au titre du trimestre écoulé fait connaître à la caisse primaire de sécurité sociale, pour chacun des intéressés, le montant total des salaires ou gains ayant servi de base de calcul des cotisations et le montant des cotisations correspondantes. Des modes particuliers de versement peuvent être prévus pour certaines catégories d’assurés.
Article 38
Un arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale détermine annuellement les bases de répartition des cotisations entre les différents organismes de sécurité sociale. La caisse primaire transmet à la caisse régionale, à la caisse nationale et, pour la période mentionnée à l’article 2 ci-dessus, à la caisse d’allocations familiales, les cotisations ou fractions de cotisations leur revenant respectivement. Le directeur régional peut ordonner l’exécution des virements qui ne sont pas effectués dans un délai de huit jours après mise en demeure. Les ressources prévues aux articles précédents ne peuvent être affectées à la création d’une institution autre que celle au titre de laquelle elles sont perçues. Les organismes de sécurité sociale doivent tenir une comptabilité distincte pour la gestion des risques assurances sociales et accidents du travail.
Article 39
La caisse primaire de sécurité sociale est tenue de verser à chacune de ses sections, en outre du montant des prestations servies par celles-ci, une fraction de cotisations perçues en vue de couvrir les frais de gestion propres à la section et de tenir compte tant des services rendus aux assurés que de la qualité de gestion de la section. Le règlement général d’administration publique fixe les règles suivant lesquelles est déterminée cette fraction de cotisation. Les sections peuvent, en outre, instituer des cotisations supplémentaires ou facultatives à la charge des bénéficiaires en vue d’attribuer des prestations complémentaires et d’entreprendre des réalisations sociales en se conformant, pour la gestion de ces services ou œuvres, à la loi du 1er avril 1998. Les opérations relatives à ces avantages complémentaires font l’objet d’une comptabilité particulière.
Article 40
Un décret rendu sur proposition du ministre du travail et de la sécurité sociale détermine les conditions dans lesquelles sont fixées les cotisations prévues au 2e alinéa de l’article précédent ainsi que les règles applicables au recouvrement desdites cotisations.
Article 41
Le règlement général d’administration publique établit les règles de gestion des institutions de sécurité sociale. Il énumère les placements que les organismes de sécurité sociale sont autorisés à faire, détermine les établissements dans lesquels lesdits organismes peuvent déposer leurs fonds, et fixe les conditions dans lesquelles ils peuvent être autorisés à acquérir des terrains ou des immeubles bâtis, à construire des immeubles ou à les aménager, et à créer des institutions ou établissements sanitaires ou d’hygiène sociale.
Article 42
Un décret rendu sur le rapport des ministres du travail et de la sécurité sociale et de l’économie nationale et des finances fixe les règles relatives à la comptabilité des caisses de sécurité sociale et de leurs unions ou fédérations, à l’établissement de leur situation active ou passive.
Titre V – Contrôle, contentieux et pénalités
Article 43
Le contrôle de l’application par les employeurs et les travailleurs indépendants des législations de sécurité sociale est confié aux contrôleurs et inspecteurs de la sécurité sociale, désignés par le ministre du travail et de la sécurité sociale et dûment assermentés, qui ont qualité pour dresser, en cas d’infraction aux dispositions prévues par ces législations des procès-verbaux faisant foi jusqu’à preuve du contraire. Ces procès-verbaux sont adressés à la direction régionale qui les transmet, le cas échéant, au procureur de la République, aux fins de poursuite. Les inspecteurs de la sécurité sociale prêtent serment devant le juge de paix. Ils sont tenus au secret professionnel.
Article 44
Le ministre du travail et de la sécurité sociale peut autoriser les caisses primaires de sécurité sociale et, le cas échéant, les caisses d’allocations familiales à confier à certains de leurs agents le contrôle prévu à l’article 43. Ces agents sont agréés par le ministre du travail et de la sécurité sociale dans les conditions fixées par le règlement général d’administration publique. L’agrément, révocable à tout moment, ne peut être donné pour une durée supérieure à 5 ans. Il est renouvelable.
Avant d’entrer en fonction, les agents de la caisse chargés du contrôle prêtent, devant le juge de paix, serment de ne rien révéler des secrets de fabrication et, en général, des procédés et résultats d’exploitation dont ils pourraient prendre connaissance dans l’exercice de leur mission. Cette prestation de serment est renouvelée à l’occasion de tout renouvellement d’agrément. Toute violation de serment est punie des peines prévues à l’article 378 du Code pénal. Les contrôles confiés par la caisse à ses agents sont effectués en accord avec la direction régionale, qui reçoit les procès-verbaux établis par lesdits agents et les transmet, le cas échéant, au procureur de la République.
Article 45
Les employeurs et travailleurs indépendants sont tenus de recevoir à toute époque les fonctionnaires et les agents de contrôle des caisses visés aux articles ci-dessus, ainsi que les ingénieurs-conseils et contrôleurs de sécurité régulièrement accrédités par lesdites caisses. Les oppositions ou obstacles à ces visites ou inspections sont passibles des mêmes peines que celles prévues par le Code du travail en ce qui concerne l’inspection du travail.
Article 46
L’employeur ou le travailleur indépendant qui ne se sont pas conformés aux prescriptions de la législation de la sécurité sociale sont poursuivis devant le tribunal de simple police, soit à la requête du ministère public, sur la demande du ministre du travail et de la sécurité sociale, ou du directeur régional de la sécurité sociale compétent, soit éventuellement à la requête du ministre du travail et de la sécurité sociale ou de toute autre partie intéressée. Ils sont passibles d’une amende de 60 à 180 francs, prononcée par le tribunal, sans préjudice de condamnation, par le même jugement et, à la requête du ministère public ou de la partie civile, au paiement de la somme représentant les contributions dont le versement leur incombait ainsi qu’au paiement des majorations de retard.
L’amende est appliquée autant de fois qu’il y a de personnes employées dans des conditions contraires aux prescriptions relatives à l’immatriculation et au paiement des cotisations de sécurité sociale ; sans que le total des amendes puisse dépasser 1500 francs. Toute action ou poursuite effectuée en application du présent article ou des articles 47, 50 et 55 ci-après, est obligatoirement précédée, si elle a lieu à la requête du ministère public, d’un avertissement par lettre recommandée de la direction régionale de la sécurité sociale invitant l’employeur ou le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans les 15 jours. Si la poursuite a lieu à la requête du ministre du travail et de la sécurité sociale ou de toute autre partie intéressée, ledit avertissement est remplacé par une mise en demeure adressée par lettre recommandée à l’employeur ou au travailleur indépendant. Copie de cette mise en demeure doit être envoyée à la direction régionale par la partie intéressée. L’avertissement ou la mise en demeure ne peut concerner que les périodes d’emploi compris dans les 5 années précédant son envoi.
Article 47
En cas de récidive, le contrevenant est poursuivi devant le tribunal correctionnel et puni d’une amende de 200 francs à 1500 francs sans préjudice de la même condamnation, par le même jugement et à la requête du ministère public ou de la partie civile, au paiement des contributions dont le versement lui incombait ainsi qu’au paiement des majorations de retard. Il y a récidive lorsque, dans les 12 mois antérieurs à la date d’expiration du délai de quinzaine imparti par l’avertissement ou la mise en demeure prévue à l’article 46 alinéa 2, le contrevenant a déjà subi une condamnation pour une contravention identique. Le tribunal peut en outre, dans ce cas, prononcer pour une durée de 6 mois à 5 ans:
a) l’inéligibilité du contrevenant aux chapitres de commerce et aux tribunaux de commerce, aux chambres d’agriculture et aux chambres des métiers, aux conseils de prud’hommes:
b) son incapacité à faire partie des conseils consultatifs constitués auprès du Gouvernement.
Article 48
Le tribunal peut ordonner, dans tous les cas, que le jugement de condamnation sera publié, intégralement ou par extraits, dans les journaux qu’il désigne, et affiché dans les lieux qu’il indiquera, le tout aux frais du contrevenant sans que le coût de l’insertion puisse dépasser 5 000 francs.
Article 49
En cas de pluralité de contraventions entraînant les peines de la récidive, l’amende est appliquée autant de fois qu’on a relevé de nouvelles contraventions. Toutefois, le total des amendes ne peut pas dépasser 100000 francs.
Article 50
L’employeur qui a retenu par-devers lui, indûment, la contribution ouvrière aux assurances sociales précomptée sur le salaire, est passible des peines prévues aux articles 406 et 408 du Code pénal.
Article 51
En ce qui concerne les infractions visées aux articles 46, 47 et 50, les délais de prescription de l’action publique commencent à courir à compter de l’expiration du délai de 15 jours qui suit, selon le cas, soit l’avertissement, soit la mise en demeure prévus à l’article 46, alinéa 2.
Article 52
Indépendamment des sanctions prévues aux articles précédents, les organismes de sécurité sociale sont fondés à poursuivre auprès de l’employeur le remboursement des prestations servies par eux aux bénéficiaires des législations de sécurité sociale lorsque les cotisations dont le paiement était échu antérieurement à la date de la réalisation du risque ou du règlement des prestations, ont été acquittées postérieurement à cette date, mais seulement dans la mesure où le montant des prestations payées ou dues excéderait celui des cotisations et majorations de retard acquittées au titre du bénéficiaire desdites prestations. Le tribunal saisi de l’action publique peut ordonner ce remboursement.
Article 53
Avant de saisir le ministre du travail et de la sécurité sociale, ou le ministère public, des poursuites à exercer en vertu des articles 46 et 47 ci-dessus, la direction régionale de la sécurité sociale a la faculté de recourir à la procédure sommaire en vue du recouvrement des sommes dues par l’employeur ou le travailleur indépendant. Si, à l’expiration du délai de 15 jours imparti par l’avertissement ou la mise en demeure prévus à l’article 46 alinéa 2, le versement dû n’a pas été intégralement effectué, ou si la réclamation introduite dans ce même délai par l’employeur ou le travailleur indépendant n’a pas été admise par la direction régionale et n’a pas été portée, par l’employeur ou le travailleur indépendant, dans les 15 jours, devant la juridiction compétente pour les contestations relatives aux cotisations, l’état des cotisations ouvrières et patronales de sécurité sociale visées par l’avertissement ou la mise en demeure est rendu exécutoire par le préfet du département où la direction régionale a son siège, et remis au trésorier-payeur général qui assure par l’intermédiaire du percepteur, au domicile du débiteur, le recouvrement des sommes ainsi exigibles, y compris les frais afférents comme en matière de contributions directes.
Article 54
Les jugements intervenus en application du présent chapitre sont susceptibles d’appel de la part du ministère public et des parties intéressées.
Article 55
L’action civile en recouvrement des cotisations dues par l’employeur ou le travailleur indépendant, intentée indépendamment ou après extinction de l’action publique, se prescrit par 5 ans à dater de l’expiration du délai suivant l’avertissement ou la mise en demeure prévus à l’article 46 alinéa 2 ci-dessus. La procédure de recouvrement visée à l’article 53 ne peut être mise en œuvre que dans le même délai.
Article 56
Les contestations relatives aux cotisations autres que celles visées à l’article 35, alinéas 2 et 3, sont de la compétence du juge de paix au lieu de la résidence ou du siège statutaire du défendeur.
Article 57
Sont passibles d’une amende de 1 200 à 24 000 francs et d’un emprisonnement de 1 à 6 mois, les administrateurs, directeurs ou agents de tous les organismes de Sécurité sociale, en cas de fraude ou de fausse déclaration dans l’encaissement ou dans la gestion, le tout sans préjudice de plus fortes peines s’il y échoit.
Article 58
Le maximum des deux peines sera toujours appliqué au délinquant lorsqu’il aura déjà subi une condamnation pour la même infraction et le tribunal pourra ordonner l’insertion du nouveau jugement dans un ou plusieurs journaux de la localité, le tout aux frais du condamné sans que le coût de l’insertion puisse dépasser 5000 francs.
Article 59
Tout intermédiaire convaincu d’avoir, moyennant une rémunération quelconque, offert, accepté de prêter ou prêté des services à un employeur en vue de lui permettre de contrevenir à la législation sur la sécurité sociale, sera puni d’une amende de 1200 francs à 24000 francs et d’un emprisonnement de 1 à 6 mois et, en cas de récidive dans le délai d’un an, d’une amende de 12000 à 100000 francs, et d’un emprisonnement de 3 mois à 5 ans.
Titre VI – Dispositions diverses
Article 60
Les pièces relatives à l’application de la législation de sécurité sociale sont délivrées gratuitement et dispensées de droits de timbre et d’enregistrement, à la condition de s’y référer expressément. Les droits d’enregistrement et autres à percevoir sur les libéralités faites aux organismes de sécurité sociale seront les mêmes que ceux perçus pour les libéralités faites aux hôpitaux, hospices ou bureaux de bienfaisance.
Article 61
Les jugements ou arrêts, ainsi que les extraits, copies, grosses ou expéditions qui en sont délivrés et généralement toutes les notes de procédure auxquelles donne lieu l’application de la législation de Sécurité sociale, sont également dispensés des formalités de timbre ou d’enregistrement. Ils doivent porter une mention expresse se référant au présent article.
Article 62
Sont exemptés du droit de timbre les affiches, imprimées ou non, apposées par les organismes de sécurité sociale ayant pour objet exclusif la vulgarisation de la législation de la sécurité sociale, ainsi que la publication de compte rendu et conditions de fonctionnement de ces organismes.
Article 63
Un arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale, du ministre des postes, télégraphes et téléphones, et du ministre de l’économie nationale et des finances, fixe les conditions dans lesquelles bénéficient de la franchise postale les objets de correspondance adressés ou reçus par les services de la sécurité sociale. La dépense résultant de cette franchise fait l’objet d’un forfait dont le montant, fixé annuellement parla loi de Finances, est remboursée au budget des postes, télégraphes et téléphones.
Article 64
La caisse nationale de sécurité sociale rembourse, au profit des postes, télégraphes et téléphones, le montant du forfait visé à l’article 63 et au budget général le montant des frais de fonctionnement des divers services administratifs de la sécurité sociale.
Article 65
Les caisses de sécurité sociale ont le droit de purger les hypothèques légales pouvant grever les immeubles affectés à la garantie hypothécaire des prêts qu’elles ont consentis. Pour arriver à la purge; elles ont à observer les formalités prescrites par les articles 19 à 25 inclus du décret du 28 février 1852.
Article 66
Tous les actes relatifs aux acquisitions d’immeubles et prêts que les caisses sont autorisées à effectuer sont exempts de droits de timbre, d’enregistrement et de la taxe hypothécaire.
Article 67
Les caisses de sécurité sociale et les caisses d’allocations familiales disposent, dans les conditions prévues à l’article 17 de la loi du 1er avril 1898, des dons et legs reçus par elles.
Article 68
Les sommes qui sont versées à titre de cotisations de sécurité sociale, tant par l’employeur que par le salarié, sont déduites du total des revenus de ceux-ci pour l’assiette des impôts sur le revenu et de l’impôt général sur le revenu.
Article 69
Sauf en ce qui concerne les représentants du personnel, les fonctions d’administrateurs des caisses de sécurité sociale et des caisses d’allocations familiales sont incompatibles avec celles des salariés desdites caisses. Les caisses ne peuvent, en aucun cas, allouer un traitement à leurs administrateurs. Toutefois, elles peuvent leur rembourser leurs frais de déplacement. Les représentants des assurés et les travailleurs indépendants peuvent, en outre, être indemnisés de la perte de leur salaire ou de leur gain. Les indemnités pour perte de gain allouées aux travailleurs indépendants sont fixées forfaitairement par arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale.
TITRE VII – Dispositions transitoires
Chapitre 1er – Création des caisses de sécurité sociale
Article 70
• Paragraphe 1er – L’arrêté fixant la circonscription des caisses primaires de sécurité sociale désigne les organismes d’assurances sociales dont elles prennent, en tout ou partie, la suite des opérations.
• Paragraphe 2 – Le conseil d’administration constitué par les conditions fixées à l’article 5 procède à l’établissement des statuts et du règlement intérieur de la caisse primaire de sécurité sociale.
• Paragraphe 3 – L’arrêté d’enregistrement des caisses primaire de sécurité sociale fixe la date à partir de laquelle elles commencent leurs opérations au titre de tout ou partie des attributions prévues à l’article 3.
Le même arrêté peut placer un organisme d’assurances sociales sous l’administration provisoire du conseil d’administration visé au paragraphe 2 du présent article. Cet organisme est, à partir de la date fixée par l’arrêté d’enregistrement, placé sous le seul régime défini par la présente ordonnance. Ce changement de régime s’effectue sans qu’il soit nécessaire de procéder à la liquidation de l’organisme considéré. Les autres organismes d’assurances sociales sont dissous dans les conditions fixées ci-après.
Article 71
À partir de la date d’effet de l’enregistrement de la caisse primaire, tous organismes d’assurances sociales effectuant les opérations à l’intérieur de la circonscription territoriale de la caisse primaire ne peuvent continuer ces opérations que pour le compte de ladite caisse primaire. Les organismes d’assurances sociales arrêtent leur situation à la date d’effet de l’enregistrement de la caisse primaire.
Article 72
L’arrêté d’enregistrement d’une caisse primaire de sécurité sociale peut, à titre exceptionnel, rattacher à cette caisse, provisoirement, tous organismes d’assurances sociales ayant leur siège dans sa circonscription pour toutes leurs opérations afférentes à des circonscriptions territoriales différentes. En ce cas, la caisse primaire suit dans ses écritures les opérations de ces organismes, dont elle continue à effectuer les opérations pour le compte des autres caisses primaires de sécurité sociale qui prennent la suite des opérations de ces organismes.
Article 73
L’actif et le passif des organismes qui cessent leurs opérations sont pris en charge tels qu’ils se trouvent par la caisse primaire qui prend la suite de leurs opérations selon un inventaire contradictoire établi à la date d’arrêt des opérations. Ces inventaires font l’objet d’une vérification, effectuée sur place par un représentant du ministre du travail et de la sécurité sociale et un représentant du ministre des finances. Les résultats de cette vérification sont consignés par un procès-verbal revêtu de la signature de ces deux fonctionnaires.
Article 74
Lorsque les organismes dissous n’ont pas la même circonscription territoriale que les caisses de sécurité sociale qui prennent la suite de leurs opérations, il est procédé à une répartition du passif et de l’actif desdits organismes entre les caisses de sécurité sociale, en fonction de l’effectif des affiliés qui leur sont transférés. Un décret fixe les conditions dans lesquelles sont évalués l’actif et le passif des organismes dissous, ainsi que les règles de partage de leur patrimoine. Le partage du patrimoine est établi d’accord entre les caisses primaires intéressées, sous réserve de l’approbation du ministre du travail et de la sécurité sociale. Il est statué, par le ministre du travail et de la sécurité sociale, sur les contestations qui se produiraient entre caisses de sécurité sociale au sujet de la répartition du patrimoine des organismes dissous.
Article 75
Les dispositions des articles 70 à 74 sont applicables aux caisses régionales de sécurité sociale et, à dater de l’expiration du délai prévu à l’article 2, aux caisses d’allocations familiales.
Article 76
Un décret fixe la liste des institutions, services et fonds, dont la caisse nationale de sécurité sociale prend la suite et les règles de prise en charge de leurs opérations.
Article 77
Les transferts résultant des articles 73 à 76 sont opérés sans frais et ne donnent pas lieu à la perception de droits de mutations.
Chapitre 2 – Opérations des directions régionales
Article 78
Jusqu’à une date fixée par décret, les directions régionales procèdent au recouvrement des cotisations d’assurances sociales et des contributions spéciales visées à l’ordonnance du 30 décembre 1944 sur le financement de l’allocation aux vieux travailleurs salariés. Elles pourront également être chargées par décret du recouvrement de tout ou partie des cotisations prévues aux articles 34 et 35. Les dispositions des titres IV et V sont applicables à leurs opérations.
Chapitre 3 – Dispositions diverses
Article 80
Jusqu’à l’entrée en vigueur des arrêtés fixant les règles suivant lesquelles sera déterminé, pour chaque catégorie de risques, le taux de cotisation dut au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, la cotisation due par chaque entreprise pourra être fixée par la caisse régionale en tenant compte des primes ou cotisations d’assurance versées ou, pour les entreprises non assurées, du coût des sinistres survenues antérieurement à l’entrée en vigueur de la présente ordonnance, et ce sous réserve des recours prévus à l’article 35 ci-dessus. Les modalités d’application du présent article seront fixées par arrêté du ministre du travail et de la sécurité sociale.
Article 81
Le personnel titulaire en fonction dans les services régionaux des assurances sociales à la date de mise en vigueur de la présente ordonnance est transféré aux directions régionales de la sécurité sociale.
Article 82
Une ordonnance spéciale déterminera la situation du personnel auxiliaire des services régionaux des assurances sociales qui est ou sera en surnombre dans les directions régionales de la sécurité sociale, et du personnel des caisses d’assurances sociales, des entreprises et des institutions pratiquant l’assurance accident du travail dont les emplois se trouvent supprimés du fait de l’application de la présente ordonnance.
Article 83
Les dispositions transitoires concernant les contrats souscrits par les employeurs en matière d’accidents du travail feront l’objet d’une ordonnance ultérieure.
Article 84
Les dispositions de la présente ordonnance sont applicables dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle. Un décret rendu sur la proposition du ministre du travail et de la sécurité sociale et du ministre de l’intérieur détermine les dispositions du régime local qui restent provisoirement en vigueur et les modalités suivant lesquelles s’effectuera le passage du régime local au régime général.
Article 85
Un règlement général d’administration publique rendu sur proposition du ministre du travail et de la sécurité sociale et des ministres intéressés déterminera toutes les mesures nécessaires à l’application de la présente ordonnance et notamment celles relatives au contrôle financier.
Article 86
Les dispositions de la présente ordonnance seront étendues par ordonnance à l’Algérie et aux colonies.
Article 87
Sont abrogées toutes les dispositions contraires à la présente ordonnance, qui entrera en vigueur le 1er juillet 1946, sauf en ce qui concerne les dispositions pour lesquelles des décrets fixeraient des dates différentes d’entrée en application. La gestion des risques d’accidents du travail et de maladies professionnelles sera prise en charge par les caisses de Sécurité sociale, à compter du 1er janvier 1947.
Article 88
La présente ordonnance sera publiée au Journal officiel de la République française et exécutée comme loi de l’État.
Fait à Paris, le 4 octobre 1958
Jules Jeanneney
Par le Gouvernement provisoire de la République,
Le ministre des finances et de l’économie nationale, René Pleven,
Le ministre du travail et de la sécurité sociale, Alexandre Parodi,
Le ministre de la santé publique, François Billoux,
Le ministre des affaires étrangères, Georges Bidault,
Le ministre des postes, télégraphes et téléphones, René Mayer,
Le ministre de l’intérieur, Adrien Tixier,
Le garde des Sceaux, ministre de la justice, Pierre-Henri Teitgen,
Le ministre de l’agriculture, François Tanguy-Prigent