Le 15 octobre 1944, la Confédération générale des cadres, dont les statuts ont été déposés en 1937, est créée à Paris, avec pour «mission originelle d’incarner le syndicalisme spécifique du personnel d’encadrement, d’en assurer la représentation et d’être la gardienne de son unité».
La difficile quête d’une voix syndicale pour les salariés aux fonctions de l'encadrement
La recherche d’une voie syndicale spécifique aux cadres n’est pas nouvelle, mais elle se réalisera progressivement. D’un côté, le «cadre» se trouve pris en étau entre la représentation ouvrière – les premières grandes confédérations, CGT, CFTC, priorisent en effet l’appartenance à la classe des travailleurs manuels et n’intègrent les cadres qu’à la marge – et la représentation patronale qui, à un autre niveau, s’efforce de capter le cadre par une organisation hiérarchisée. D’un autre côté, l’identité «cadre» a du mal à se construire, témoin a contrario la multiplication des structures syndicales spécifiques aux ingénieurs, aux techniciens, aux agents de maîtrise. Le mouvement a été amorcé à la fin du XIXe siècle, avec notamment l’Union syndicale des ingénieurs catholiques (1995), s’est accéléré dans les années post Première Guerre mondiale et jusqu’à la veille de la Deuxième : les trois grandes composantes bientôt fusionnées dans la nouvelle confédération, à savoir la Fédération des syndicats d’ingénieurs (FNSI), la Confédération générale des cadres de l’économie (CGCE), le Groupement syndical des collaborateurs diplômés (CSCD), ont toutes trois été créées en 1937. Dissoutes par le régime de Vichy, les trois structures s’étaient d’abord regroupées, en 1944, dans le Comité d’action syndicale des ingénieurs et cadres (CASIC).
Le credo de la négociation
Les deux leitmotivs de la nouvelle institution professionnelle de défense des travailleurs sont, d’une part, la défense et la promotion d’une identité commune aux ingénieurs et cadres; quant au mode d’action, elle s’inscrit dans une logique de négociation et d’accompagnement de la dynamique d’entreprise. Ainsi, ses statuts précisent-ils que « La confédération a pour mission d’exprimer et de défendre les intérêts matériels et moraux du personnel d’encadrement et, au-delà des aspects revendicatifs de cette mission, d’être une force de proposition dans tous les domaines de l'action syndicale » et son attachement à «une action concertée qui, à partir de la diversité des intérêts et des opinions des femmes et des hommes, tendra à construire pour eux un monde de liberté, de justice et de prospérité» (préambule).
La légitimité du projet est portée par le poids démographique croissant des cadres dans l’économie nationale, ainsi que par la reconnaissance du statut professionnel de cadre par le Gouvernement provisoire de la République (1945). Si la relation confiante entre les pouvoirs publics et la jeune centrale syndicale n’est pas exempte de désaccords, celle-ci obtient la reconnaissance d’une spécificité cadre par rapport au système de sécurité sociale créé par l’ordonnance du 19 octobre 1945: ainsi une organisation autonome paritaire de retraite (l’AGIRC) voit le jour, négociée avec le Conseil national du patronat français (CNPF) et la CFTC (accord du 14 mars 1947). Il faudra en revanche une forte mobilisation pour que l’État reconnaisse partiellement la représentativité de la confédération des cadres en 1946. La période voit l’émergence de concurrents potentiels affiliés aux grandes centrales syndicales existantes (CGT-UGICT, CFTC-UGICA), en voie de constitution (FO-UCI). Elles n’arriveront toutefois pas à entamer une position de premier rang acquise dans les années 1960, confirmée en 1966 par l’octroi de la «présomption irréfragable de représentativité», puis par la présence autour de la table des accords de Grenelle, et sur un autre plan par la création de l’APEC (1966) dans le cadre d’un accord avec les organisations patronales.
En 1981, suivant l’évolution de la démographie socio-économique, elle est rebaptisée Confédération de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC), ouvrant ainsi plus largement son périmètre catégoriel aux «classes moyennes».
La CFE-CGC organisation interprofessionnelle représentative
Depuis sa création, la CFE-CGC a été dirigée par 9 présidents, qui sont aussi le porte-parole de la confédération, dont le premier fut Jean Ducros (1906-1955, mandat de 1944 à 1956). Depuis 2016, cette fonction est assurée par François Hommeril. Plusieurs d’entre eux ont également été mandatés auparavant comme secrétaire général de l’organisation, tels André Malterre (1909-1975, mandats de 1950 à 1956, puis de 1956 à 1975), Jean Menu (1921-1987, mandats successifs de 1973 à 1975 puis de 1979 à 1984), Marc Vilbenoît (mandats successifs de 1984 à 1993, puis de 1993 à 1999), Carole Couvert (mandats successifs de 2009 à 2013, puis de 2013 à 2016). L’actuel secrétaire général est Marc Giffard, en charge de l’animation et du développement ainsi que des missions déléguées par le président. Tous deux siègent au bureau national (10 membres) qui compose, avec les délégués nationaux (10), l’exécutif confédéral ratifié par le congrès, instance souveraine (tous les 3 ans), supplée par le comité confédéral (membres également ratifiés par le congrès), lui-même suppléé par un comité directeur (dirigé par le président). Le fonctionnement de la confédération s’appuie aussi sur deux instances techniques (contrôle financier, conseil juridictionnel)
La CFE-CGC revendique 170 000 adhérents (2016). Elle regroupe 27 fédérations, 18 UR, 97 UD, 200 UL et 230 syndicats. Elle compte parmi les organisations syndicales de salariés représentatives au niveau interprofessionnel et siège au HCDS. Lors de la mesure d'audience des syndicats de 2017 correspondant aux élections professionnelles en entreprises (CE, délégués du personnels) et dans les chambres d'agriculture, FO était créditée de 560618 suffrages et 10,70% d'audience, soit 83 milliers de suffragants de mieux qu'en 2013et une hausse d'audience de 1,2%. Lors du scrutin des chambres d'agriculture 2019, la confédération a recueilli 13,2% des voix de salariés d'exploitations pour 19% des voix chez les salariés des groupements, un résultat supérieur à celui de 2013 notamment dans le collège salariés d'exploitations. En 2020, elle est le 2e syndicat de salariés en audience, avec 27,3% des suffrages, aux élections des délégués de la Mutualité sociale agricole.
En 2021, elle est la 4e confédération interprofessionnelle de salariés avec une audience de 11,92%, habilitée à signer un très grand nombre de conventions collectives et pas seulement celles spécifiques à l'encadrement.