La décision de la Cour de cassation de valider le principe de plafonnement des indemnités prud'homales, suite notamment à d'autres décisions judiciaires d'instance hiérarchiquement inférieure, et à la saisine de syndicats de salariés, divise les camps des principales organisations représentatives du salariat et du patronat.
Une sécurisation des entreprises pour les organisations patronales
L'Union des entreprises de proximité se dit satisfaite «pour tous les employeurs de l’artisanat, du commerce de proximité et des professions libérales qui ont pu constater les bienfaits de cette mesure». Pour l'U2P et son président Alain Griset, il en va de la sécurisation des «entreprises, en particulier les plus petites», mais aussi d'une réduction des «inégalités de jugement d’une région à l’autre».
Pour la Confédération des petites et moyennes entreprises, c'est aussi une «bonne nouvelle pour les entreprises», dans la mesure où le barème «assure une cohérence à travers l’ensemble du territoire national et favorise la conciliation». La CPME espère toutefois «que toutes les juridictions prud’homales appliquent la Loi».
Une décision regrettable pour les salariés selon les syndicats
La Confédération française et démocratique du travail considère en revanche que «ces barèmes portent atteinte au principe de réparation intégrale du préjudice et tel qu’issus des ordonnances, sont contraires aux normes internationales et européennes». Elle rappelle toutefois que la décision «ne lie donc ni les conseils prud’homaux, ni les cours d’appel, ni même la Cour de cassation elle-même».
Force ouvrière déplore une décision fondée sur des «arguments contradictoires», au regard des textes régissant l'OIT (ne donnant pas de «marge de manœuvre aux États») et la Charte sociale européenne (ouvrant une possibilité de déroger), et annonce son intention de continuer à batailler via «tant le Comité européen des droits sociaux (organe officiel chargé d’interpréter la Charte sociale européenne) qu’au niveau international devant le Bureau international du travail (s’agissant de la Convention 158 de l’OIT)».
Pour l'Union syndicales Solidaires, qui rappelle que «ce barème reste soumis à l'appréciation du juge de fond», la Cour de cassation a néanmoins validé une «atteinte aux droits des salarié-es, notamment en ce qui concerne leur préjudice». L'organisation syndicale plaide au contraire pour «la réparation intégrale du préjudice subi suite à la perte indue d'un emploi, comme la réintégration de droit du/de la salarié-e, en lieu et place d'une indemnisation forfaitaire, voire dérisoire en raison d'une faible ancienneté et du fait de travailler dans une très petite entreprise».
La Confédération générale du travail dénonce un soutien du «pouvoir judiciaire» au «Gouvernement qui, depuis plusieurs mois, méprise les décisions rendues par les conseils de prud’hommes et met la pression aux juges». La CGT ne doute pas que «le Comité européen des droits sociaux (…) considèrera que les barèmes, en ce qu’ils permettent uniquement aux employeurs violant le Code du travail d’anticiper le “coût” d’un licenciement injustifié, sont contraires aux engagements internationaux ratifiés par la France».
La Confédération française de l'encadrement considère que l'avis de la Cour «constitue une défaite morale de la France» en même temps qu'une «interprétation étriquée de la convention n°158 de l’OIT», dont elle rappelle que le Président de la République a récemment et pourtant réaffirmé la légitimité. Pour la CFE-CGC, «forfaitiser les indemnités dans le cadre de la réparation revient à attribuer un coût au licenciement, à traiter la rupture, forcément douloureuse quand elle est litigieuse, comme une marchandise dont le coût peut être anticipé et provisionné».
Communiqué CFE-CGC – 19 juillet 2019; Communiqué Solidaires – 18 juillet 2019; Communiqué U2P; Communiqué CPME; Communiqué CFDT; Communiqué CGT; Communiqué FO – 17 juillet 2019